Comment naissent les (réductions de) prix #2

 

Le « Black Friday » américain est désormais parfaitement installé en France à l’image d’Halloween et de toutes les traditions anglo-saxonnes apportées par la mondialisation de notre société. Apparaît bien entendu en parallèle tout un flot de critiques et de solutions pour luter contre la surconsommation de notre économie. Ô grand drame du monde moderne, les opérations commerciales et autres « opérations à rabais » serviraient uniquement à pousser la consommation au profit des « plus riches ». 

Pendant que de nombreuses enseignes appellent au boycott de cette journée en avançant des arguments leur permettant de se faire une petite place dans la campagne de publicité du moment, certains « Géants » profitent de l’occasion pour personnaliser l’événement à leur image en accolant, par exemple, leur nom au jour tant attendu par des milliards de consommateurs ou en faisant de cette journée le fer de lance de leur responsabilité sociale et sociétale. Notre monde se responsabiliserait-il ou le marketing n’aurait-il plus de limites? 

Issus de la génération Erasmus, contemporains de nombreuses catastrophes industrielles et des abus de la société moderne, toutes ces questions ont guidé les choix des dirigeants de Monsieur London depuis la création du projet et restent encore sujettes à de nombreuses discussions dans la mesure où la croissance de la marque se retrouve en permanence confrontée à la concurrence de nouveaux acteurs et aux réalités financières du marché.

Nous parlions il y a un peu plus de 4 ans de la consommation responsable et des conséquences sur nos prix et nos marges, nous avons souvent répété que nous ne pouvions pas pratiquer de « ventes à rabais » compte tenu des choix que nous avions fait et nous avons choisi cette année d’accorder à nos clients 3 grands jours de réduction sur l’ensemble de nos produits…

L’équipe a t’elle vendue son âme au diable capitaliste et avons nous sacrifié notre qualité sur l’échafaud des marges nécessaires à la croissance de notre portefeuille? Avons nous abandonné nos valeurs en lançant une exploitation d’ouvriers peu formés dans une cave du Marais parisien?

Cette question taraude très sûrement nos plus fidèles Monsieurs et leurs Amies qui suivent nos tribulations depuis le début. Nous vous rassurons tout de suite, bien sur que non! Notre crédo reste inchangé : Consommez moins pour consommez mieux. Nous veillons sans cesse à rester « l’une des marques les plus abordables du monde » comme nous l’affirmions modestement dans ces pages en juin 2014. Nos marges restent bien en dessous de celles pratiquées par le marché de l’accessoire et notre transparence nous donne l’occasion de reprendre la plume. 

Avant toutes choses, faisons un bref retour sur l’historique de ces opérations trop souvent vues comme de simples outils commerciaux au profit des patrons véreux qui rentrent le soir avec leurs valises de pognon sous le bras pour surtout ne pas devoir trop donner aux fournisseurs et aux salariés qui les aident à se développer. Notre société est schysophrène, c’est bien connu…

Alors que les soldes seraient nées en France dans l’imagination de Simon Manoury, (fondateur en 1830 du premier grand magasin parisien, le "Petit Saint-Thomas" qui deviendra le « Bon Marché » en 1852, bien avant l’ouverture du " Printemps", en 1865) pour pouvoir écouler les stocks invendus à la fin d’une saison, le Black friday est né aux Etats-unis dans les années 60 pour relancer la consommation avant les fêtes et réécrire les comptes en noir à l’inverse de la période précédente qui se retrouve très souvent écrit en rouge car déficitaire. Les entreprises perdraient de l’argent? Inimaginable!

Par la suite, les ventes aux rabais se sont développées, permettant aussi bien aux vendeurs d’accroître ou trouver leur rentabilité et aux consommateurs d’accéder à des produits qu’ils n’achèteraient pas nécessairement compte tenu des prix pratiqués habituellement. Des pratiques de consommations individuelles et collectives se sont développées avec le temps chez des personnes désireuses d’acquérir ou de faire profiter à leurs proches de certains biens qui sont proposés normalement à un prix qu’elles considèrent peu accessibles dans leur quotidien.

La responsabilité de ces pratiques porte réellement à critiques à partir du moment où la consommation est envisagée dans une logique capitaliste dans laquelle les investisseurs font simplement croître leur portefeuille d’affaires ou dans une logique de sur-consommation de produits nuisibles pour l’environnement ou la société en générale. A l’inverse, ces démarches permettant le développement de l’économie peuvent avoir un impact bénéfique dans l’hypothèse où la consommation se tourne vers des produits fabriqués de façons responsables et durables par des hommes et des femmes qui retrouvent les bénéfices de leur travail. La sur-consommation de biens ou de services dans le cadre d’une économie responsable ne peut-elle pas être considérée au final comme une mutualisation des profits poussant à une meilleure répartition des richesses?

C’est sur cette base que l’équipe a décidé cette année d’accorder une réduction de 30% avec le code « BLACKFRIDAY » sur l’ensemble des sites de Monsieur London et une réduction de 20% à la Garçonnière. Compte tenu des nombreux savoir-faire retrouvés dans les produits proposés et des valeurs de la marque, il nous semblait en effet important de pouvoir diffuser notre offre à des personnes qui pourraient habituellement trouver les prix pratiqués au delà de ceux qu’ils consacreraient à de tels produits.

Nos marges n’ont pour autant pas beaucoup évolué en 4 ans. Soyons honnêtes : 7 points pour le moment et nous en visons 3 de plus pour pouvoir nous appuyer sur certains distributeurs incontournables et diffuser notre offre plus largement. Pour y arriver, pas d’augmentation de prix ni de réduction de la qualité proposée mais simplement une focalisation sur certains produits tout en mesurant nos charges fixes pour atteindre les volumes nécessaires à l’équilibre économique du projet. Nous avons du parfois jongler avec les différentes contraintes imposées par l’environnement dans lequel nous évoluons mais le modèle développé autour du concept collaboratif de la Garçonnière nous a permis très certainement de conserver le meilleur rapport qualité/prix actuellement proposé sur le marché de l’accessoire compte tenu des savoir-faire mobilisés (artisans, manufacturiers, artistes, entrepreneurs…), des prix pratiqués et de notre présence en physique à Paris, à Ajaccio, à Bordeaux et bientôt dans de nombreuses villes en France et en Europe. Dans une économie de partage des connaissances 1+1 = 3 et l’intelligence collective mise en place dans ce réseau de jeunes marques et d’entrepreneurs talentueux nous a permis de faire grandir le projet, sans pour autant vendre notre âme au Diable et reculer sur nos valeurs.

L’ensemble de l’équipe de Monsieur London reste très attaché à fournir des produits de qualité et durables à un maximum de personnes, faisant ainsi connaître le travail responsable réalisé par des experts des belles matières en Europe et dans le monde. Le développement de notre modèle économique pour assurer une distribution de proximité nous permettant désormais d’accorder des remises sur l’ensembles de nos produits de façons exceptionnelles, nous sommes heureux de pouvoir remercier nos clients et favoriser l’accès à notre offre à toutes les personnes qui le souhaiteraient, sans pour autant condamner la société économique mondiale qui reste basée sur une reconnaissance financière du travail effectué. 

Les artisans et les petits manufacturiers n’ont malheureusement pas de « droit de suite » sur leur création comme cela pourrait exister dans certains milieux artistiques. Nous espérons ainsi pouvoir permettre, à travers cette opération temporaire, la promotion et l’accès à leur travail à un public le plus large possible tout en leur assurant la rémunération méritée. Chez Monsieur London, nous continuerons donc à développer des démarches en faveur du maintien des savoir-faire traditionnels et des « talents » autant que notre développement le permettra sans jamais oublier le client final et la société dans son ensemble parce que pour nous, c’est aussi ça consommer de façon responsable!

Bertrand Malatray