Virée sur la côte Amalfitaine

La dolce vitaL'Almanach ouvre aujourd'hui ses portes à un gentleman parisien à l'élégance italienne, qui utilise ses talents de conteur pour nous narrer l'histoire rêvée d'un de nos produits. Bonne lecture à tous. 

27 mai 2013

J’ai vu le jour la nuit dernière. Sur mon carnet de naissance figurent mes mensurations, et à l’aube de mon existence une première conclusion s’impose déjà : avec 59cm, j’entre directement dans la catégorie des grands. C’est d’autant plus surprenant que je ne pèse que 2,5 kilos. Mais pas aussi surprenant que ma couleur : je suis roux. Avec deux parents colombiens, il faut le faire.

A l’heure où je vous parle je suis en route pour ma famille d’adoption, dont j’ignore encore tout sinon qu’ils habitent un lointain pays nommé Paris, où les gens se nourrissent de fromages, de discussions politiques et de mauvais temps. Mes coutures neuves tirent et me démangent, mais à l’atelier on m’avait déjà prévenu des petits désagréments du fait main, largement compensés par une statistique selon laquelle je vivrai plus longtemps. Fidèle au précepte selon lequel on ne voyage bien que léger, j’ai l’estomac plus vide que le cerveau de Nabila. Mes premières nourritures terrestres devraient bientôt me donner ma forme définitive. J’oubliais : de part mes origines, je m’accommode mal de la nourriture telle que vous la concevez probablement. J’ingère principalement du coton, de la laine, de la soie, et parfois même du cuir : un peu d’anthropophagie n’a jamais tué personne. Vous l’avez deviné, je suis un sac (de voyage) et je réponds au nom de Baranquilla.

1er juin 2013

Paris est telle qu’on me l’avait décrite : nous sommes en juin, il pleut la moitié de la journée, et l’autre moitié il fait froid.

Heureusement, ma nouvelle famille d’adoption m’attendait pour mettre les voiles. Direction l’Italie, où je vais probablement croiser des cousins éloignés, il parait qu’avec l’Angleterre ce sont les deux pays européens du fattoamano.

2 juin 2013

Je suis coincé sur la minuscule banquette arrière d’une étrange voiture dépourvue de toit et nous filons à 180 kilomètres par heure sur l’autoroute sinueuse et vallonnée qui sépare Menton de Gênes. Je suis farci à craquer et c’est la première fois. Associé à la vitesse, aux virages et au bruit du vent, j’ai un peu envie de vomir mais c’est tout de même très agréable.

Quelques heures plus tard, on me cache dans le coffre le temps du déjeuner. Mes propriétaires reprendront le volant repus, angéliques et ravis. Je tends l’oreille et par dessus le ronronnement des carburateurs je comprends qu’ils étaient à La Chiglia, Via Olivo, 317 à  Portovenere. Ils se dit que la soupe de poisson y est décidément la meilleure du monde.

Amalfi

3 juin 2013

J’ai dormi toute la fin du voyage. C’est que c’est long, pour une première. Je me réveille sous les assauts d’un soleil matinal féroce, il faudra que je dise à mon propriétaire de penser à me crémer de temps en temps et de ne pas me laisser trop souvent dormir sur la terrasse, surtout si celle-ci domine la mer. 

Je me sens plus léger, il m’a délesté d’un maillot de bain rouge, d’une paire d’espadrilles et d’une chemise blanche à larges rayures bleue, et il est descendu directement de sa chambre dans la mer fraîche et pure du matin via un escalier taillé à flanc de rocher et réservé aux clients de l’hôtel. Posé sur ma table, en évidence comme tout bel objet que l’on n’a pas besoin de cacher, je constate que tout est beau autour de moi, à la frontière du surnaturel. Je croise et décroise mes lanières pour formuler un voeu : celui d’y revenir l’année prochaine. Je n’ai plus qu’à bien me tenir.

Et puisque vous m’avez lu jusqu’au bout, je vous donne l’adresse : c’est l’hotel Belvedere, à Conca dei Marini, sur la costa Amalfitana. A fréquenter avec une femme de goût, un solide appétit, et de beaux accessoires. Et moi !

Sac cousu main

Stéphane 

Stéphane est nouveau venu sur le blog. Outre ses livres, chroniques radio et conférences, il est connu pour aimer l'odeur du cirage à chaussure, les canapés Chesterfield, le Cabernet Franc, la haute-fidélité des années 1959 à 1978, les tâches de rousseur, les road-trips en cabriolet inconfortable et l'Italie.

Retrouvez-le sur son site : www.spikeseduction.com, et si vous aimez les # et les @, sur sa page twitter : https://twitter.com/SpikeSed 

 

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